Comment piloter une équipe qui ne partage pas les mêmes bureaux ? C’est une question sur laquelle les équipes du Chaudron.io et de Sc21 ont fait beaucoup de tests. On vous partage aujourd’hui notre retour d’expérience, et la “méthode des 3 cailloux” qui, parmi tout ce que nous avons testés, nous semble le mieux fonctionner. En espérant que ça puisse vous aider.
Les équipes de Sc21 et du Chaudron.io ont traversé beaucoup de phases différentes, et beaucoup d’expérimentations sur la question : comment piloter une équipe qui ne partage pas les mêmes bureaux ? Nous avons en effet toujours été une petite structure, entre 7 et 15 personnes, mais répartis entre la Vendée, Nantes, Paris, parfois Lille, et certains nomades. Avec des collègues à 4/5è, des collègues plutôt du soir, d’autres plutôt du matin ou encore du week-end. Pas le même espace et pas toujours le même temps. Comment tout gérer à distance et en asynchrone souvent ? Nous nous sommes beaucoup plantés sur le sujet, notamment en cherchant le juste milieu entre un management complètement absent, et un micro-management trop prenant.
Un questionnement de longues années et toujours présent
Lorsqu’on pilote une équipe en présentiel, bon nombre de décisions sont prises dans des temps informels, en se croisant autour de la machine à café, lors d’un passage dans le bureau, … A distance, ces temps informels existent moins, ou sous d’autres formes (pauses café virtuelles par exemple). Le besoin de formaliser les temps et outils de prise de décisions est plus fort.
Nous avons beaucoup cherché la bonne granularité d’information à partager pour bien piloter l’entreprise. Comment la partager aussi. Et le bon rythme pour le faire : à quel moment tu laisses bosser ton équipe ? Comment tu gardes la vue sur ce qu’ils font sans les croiser dans leur lieu de travail ? Comment tu laisses exister des temps informels à distance ? Par quoi passe l’informel d’ailleurs ? Comment ritualise-t-on pour éviter de ne jamais se croiser (dans le monde virtuel à défaut du réel) ?
La méthode des 3 cailloux
Après moultes tentatives de rituels et d’outils pour répondre à la question, nous en sommes arrivés à tester la “méthode des 3 cailloux”. Et pour l’instant, celle-ci semble bien convenir. C’est pourquoi, on vous la partage.
La méthode part du constat que dans nos métiers (conseil, formation, et organisation événementielle principalement), nous avons plein de cailloux (= des tâches) dans nos semaines. Pour tous ces cailloux, nous sommes chacun des adultes responsables, ainsi nous les pilotons et les menons nous-même, en sachant solliciter un point avec le chef de projet concerné lorsque nécessaire.
Toutefois, ces cailloux dont nous sommes chacun responsables contribuent à faire avancer l’entreprise, donc le collectif. Ainsi, parmi tout ce tas de cailloux, chaque membre de l’équipe choisit chaque semaine 3 cailloux importants. On définit ces “big cailloux” comme des engagements collectifs d’entreprise à la semaine. Vendredi, toute l’entreprise (quoi qu’il arrive aux responsables initiaux des cailloux) aura livré la somme de ces tâches.
Par exemple, si dans la semaine j’avais prévu de finir d’envoyer 2 devis, d’organiser le kickoff de la mission “Toto” et de finaliser 3 supports pour l’atelier que j’anime la semaine suivante, je décide de mettre dans le “pot des big cailloux” le devis majeur sur les 2 (celui qui aura le plus vite de la valeur pour l’entreprise), le kickoff car je sais que c’est important de lancer maintenant la mission, et le support le plus important des 3. J’ai mes 3 cailloux de la semaine. Sur le reste, on se fait confiance, on sait piloter nous-même et il n’y a pas de danger critique : si je tombe malade, ça peut attendre mon retour.
En revanche, ces 3 cailloux que j’ai sélectionnés, on les pose comme étant de l’ordre de l’engagement de toute l’équipe. Donc je les rend lisible pour toute l’équipe, je ne les garde pas dans ma todo perso. On en fait du commun.
En termes d’animation de la méthode, cela se passe en 4 temps :
- On prépare, on choisit les cailloux qu’on met dans le pot. Le management en prend connaissance pour assurer la cohérence avec la roadmap de l’entreprise.
- En début de semaine, lors du Weekly, on les passe en revue pour les partager et en faire un engagement collectif.
- A mi-semaine, on fait un point d’étape pour identifier les cailloux qui prennent l’eau (à cause d’une surcharge, d’un arrêt maladie, d’un manque de réponse, … les causes sont multiples) et les secourir afin qu’ils soient terminés pour vendredi. Ou bien pour décider collectivement qu’ils peuvent être reportés sans danger au profit d’autres actualités plus prioritaires.
- Vendredi, on confirme que les cailloux sont arrivés à terme. On relève les écarts s’il y en a et voyons comment corriger. Et bien sûr on retourne à l’étape 1 pour préparer la semaine suivante.
Côté outil, nous avons choisi que notre “pot des big cailloux” soit un tableau Redbooth (outil de gestion de tâches comme Trello, Asana, …). Ce tableau où toute l’équipe place ses 3 cailloux devient notre roadmap de la semaine.
Comme pour tout rituel de management, la “méthode des 3 cailloux” nécessite un pilote de la démarche : quelqu’un qui batte le tambour pour animer la méthode auprès de l’équipe.
Un rituel pour créer du commun et du collectif dans une équipe à distance
On ne dit pas là que l’entreprise ne produit chaque semaine que 3 livrables x le nombres de collaborateurs. Le reste des livrables est géré par chacun, avec plus ou moins de difficultés, plus ou moins de réussite, plus ou moins de retard. Mais tout cela est géré dans une relation managériale traditionnelle. Et les objectifs prioritaires pour l’entreprise sont assurés par toute l’équipe.
Les “3 cailloux”, c’est aussi à propos de comment faire équipe en créant un engagement commun. C’est un rituel pour sécuriser la production de l’entreprise au titre de l’entreprise, du collectif, et non au titre individuel. C’est un dispositif qui permet de faire équipe, faire lien, en prenant des engagements ensemble malgré la distance physique. Ca instaure aussi des rituels qui permettent de se parler régulièrement, plutôt que chacun ne bosse dans son coin sur ce qui le concerne, et de s’autoriser de la solidarité.